Le geste d'un généreux passionné

Devenu, par amour, proprié­taire du « SNS 066 Bailli de Suffren II » réformé, un parti­cu­lier géné­reux donne ses moteurs pour permettre au « SNS 063 CV L’Her­mi­nier II » – trente et un ans de service – d’as­su­rer, pour quelques années encore, la sécu­rité dans les Bouches de Boni­fa­cio. Histoire rare d’un beau geste.

Deux bateaux de la SNSM dans un Hangard
À gauche, l’ex-"SNS 066" de Saint-Tropez, propriété d’un particulier. À droite, le "SNS 063" de Bonifacio. Le premier donne son moteur pour prolonger la vie et les services du second ©SNSM

Réfor­més, les vieux canots de la SNSM partent rare­ment à la casse. Une seconde vie les attend souvent : dans les secours en mer à l’étran­ger, une asso­cia­tion patri­mo­niale ou, plus rare­ment, dans les mains géné­reuses d’un parti­cu­lier. « J’ai racheté, témoigne cet homme, fier mais anonyme, le SNS 066 Bailli de Suffren II. » Une première façon de soute­nir la SNSM, dont le budget dépend gran­de­ment de la géné­ro­sité du public. « Puis j’ai donné ses deux moteurs au Pôle de soutien de la flotte de la SNSM. » Second coup de pouce du même parti­cu­lier, bien… parti­cu­lier. En quoi ?

L’his­toire commence voilà un demi-siècle. « Gamin, en séjour à Saint-Tropez, je n’avais d’yeux que pour le canot des sauve­teurs. » L’en­fant émer­veillé devien­dra collec­tion­neur de bateaux réfor­més. Son dernier : une vedette des douanes. Se parta­geant entre Paris et Saint-Tropez, notre homme apprend que le canot tropé­zien doit être remplacé par un navire de nouvelle géné­ra­tion : le SNS 004 Bailli de Suffren III, 19 m, sorti des chan­tiers Sibi­ril de Caran­tec. S’im­pose alors l’idée de le rache­ter. « Ça a pris du temps mais, en janvier dernier, la tran­sac­tion était réglée. Le SNS 066 part aux ateliers pour une restau­ra­tion minu­tieuse, dont le rempla­ce­ment des moteurs », car le proprié­taire entend répondre aux normes IMO Tier III actuelles et futures.

À Paris, au siège de la SNSM, Baptiste Fantin, direc­teur des services tech­niques, a un problème : le moteur bâbord du SNS 063 CV L’Her­mi­nier II, de la station de Boni­fa­cio, rend l’âme, après trente-et-un ans de service. Vu la forte acti­vité de la station (cinquante-cinq sorties et cent treize personnes secou­rues en 2020), il faut le rempla­cer en atten­dant l’ar­ri­vée du nouveau canot, prévue en 2024. La facture s’élève à 120 000 €. Un souci majeur s’ajoute : ce type de moteur n’est plus dispo­nible ! Baptiste pense alors à une solu­tion : l’ache­teur du Bailli accep­te­rait-il de céder à L’Her­mi­nier II les moteurs qu’il remplace ? La facture tombe­rait alors à 32 000 €. 

Un géné­reux dona­teur

« Il m’a joint, raconte notre dona­teur. J’ai alors contacté une dame de la station, qui m’a convaincu. » En moins d’une heure, l’af­faire est conclue1. C’est ainsi qu’au prin­temps dernier, l’ex-SNS 066 et le SNS 063 se retrouvent aux chan­tiers de Saint-Mandrier, près de Toulon, pour une greffe de l’un à l’autre. « Un énorme merci au dona­teur  », conclut Marc Domi­nique Tramoni, président de la station de Boni­fa­cio. « Grâce à lui, notre canot est de nouveau opéra­tion­nel. Et nous n’avons plus à craindre un inci­dent méca­nique. »

1 – Un moteur et ses péri­phé­riques iront à L’Her­mi­nier et l’autre sera remis au Pôle de soutien de la flotte SNSM, à Saint-Malo

Article rédigé par Patrick Moreau, diffusé dans le maga­zine Sauve­tage n°157 (3e trimestre 2021)