Loguivy-de-la-Mer : incendie de batterie sur un voilier de course

Le Poyel 2 a pris feu en pleine nuit lors d’un convoyage le 31 mai 2023. Ses occu­pants n’ont eu que quelques minutes pour s’échap­per. Ils ont été récu­pé­rés sains et saufs par le SNS 090 Zant Ivy, dans des condi­tions parti­cu­liè­re­ment dures.

Canot tous temps SNS 090 Zant Ivy en mer
L’équipage du "SNS 090 Zant Ivy" a eu du mal à repérer le canot de survie des navigateurs en pleine nuit et dans une mer agitée © Vincent Jacquenet

Parti de La Rochelle pour Caen, le Poyel 2 vient de passer l’île de Bréhat ce 31 mai vers 1 h 20. À son bord, Edgard Vincens et Julien Pulvé, deux marins profes­sion­nels expé­ri­men­tés. Ils convoient le Class40 de 12 mètres pour parti­ci­per à une course au large lorsqu’un incen­die se déclare dans le compar­ti­ment à batte­ries du voilier, mis à l’eau moins de deux mois aupa­ra­vant.

Le skip­per et son équi­pier se répar­tissent vite les tâches. L’un trans­met un message de détresse au centre régio­nal opéra­tion­nel de surveillance et de sauve­tage (CROSS) Corsen à 1 h 30, tandis que l’autre récu­père le grab bag – sac étanche rassem­blant les choses précieuses – et largue le radeau de sauve­tage. Les flammes barrent déjà l’en­trée de la cabine quand ils quittent le bateau et enfilent leurs combi­nai­sons de survie une fois à bord du radeau. Pendant ce temps, le CROSS réarme le séma­phore de Bréhat, fermé la nuit, pour faci­li­ter le repé­rage du bateau. À 1 h 40, il engage le canot tous temps SNS 090 Zant Ivy, de Loguivy-de-la-Mer.

À bord de leur canot de survie dans une mer forte et hachée

Il fait nuit noire. Le vent d’est/nord-est de force 6 lève une mer forte et hachée par des vagues qu’am­pli­fie un puis­sant courant de marée. Au poste radio, Cathy Thomas se concentre sur les instru­ments de navi­ga­tion. « Le top, c’est quand ils ont déclen­ché leurs balises de détresse AIS [Ndlr : système d’iden­ti­fi­ca­tion auto­ma­tique par radio], souligne la sauve­teuse. Je les ai vus instan­ta­né­ment sur la carte élec­tro­nique et j’ai pu enre­gis­trer leur posi­tion, tandis que le CROSS nous infor­mait sur leur dérive. » « Ces balises sont chères, mais elles ont été déter­mi­nantes pour les trou­ver rapi­de­ment », pour­suit Yann Riou, patron du Zant Ivy.

Après avoir parcouru une dizaine de milles, le SNS 090 est tout proche des naufra­gés. Mais impos­sible de les repé­rer. « Il y avait des creux de 3 à 4 mètres, se souvient Yann Riou. Je voyais de temps en temps le feu blanc de leur canot de survie entre deux vagues. Nous leur avons demandé de tirer un feu rouge de détresse et nous avons pu les récu­pé­rer. »

« Ils se portaient bien », se souvient Cathy Thomas. Infir­mière de métier, elle a fait passer un bilan en premiers secours aux naufra­gés, qu’elle a trans­mis aux pompiers qui les ont accueillis à Loguivy-de-la-Mer, avant de les conduire à l’hô­pi­tal de Paim­pol.

Julien Pulvé : « Nous avons dû prendre la décision de quitter le bateau en quelques secondes seulement »

Moins d’une jour­née après l’in­ci­dent, Julien Pulvé a « un peu repris [ses] esprits ». L’un des deux occu­pants du Poyel 2 en profite pour écrire un message sur son compte Face­book. « Nous avons dû prendre la déci­sion de quit­ter le bateau en quelques secondes seule­ment », explique le navi­ga­teur, qui se féli­cite d’avoir « eu les bons réflexes grâce aux stages de survie obli­ga­toires » qu’il a suivis.

Après avoir alerté les secours et attrapé le strict néces­saire, les deux hommes sautent à l’eau tandis que « des flammes de plus de 2 mètres gran­dis­santes s’échappent de la descente du bateau… Scène horri­fiante  ». Ils rejoignent leur radeau de sauve­tage, qui s’est gonflé à l’en­vers, et attendent les secours. Trois heures plus tard, les béné­voles de la station SNSM de Loguivy-de-la-Mer sont là.

Julien Pulvé a beau être un profes­sion­nel entraîné, cette épreuve l’a marqué. « C’est une situa­tion à laquelle je suis formé. La vivre est une autre chose et une épreuve de survie. Je suis heureux d’en sortir vivant, avoue l’ath­lète de 37 ans. Ces images reste­ront gravées dans ma mémoire. »

Équipage engagé

Canot tous temps
SNS 090 Zant Ivy

Patron : Yann Riou

Méca­ni­cien : Chris­tian Roux

Radio : Cathy Thomas

Équi­piers : Léna Cher­bon­nel, Marc Sois­sons

Article rédigé par Domi­nique Malé­cot, diffusé dans le maga­­­­­­­­­­­­­­­­­zine Sauve­­­­­­­­­­­­­­­­­tage n°165 (3ème trimestre 2023)