Le skipper Gilles Buekenhout se retourne avec son trimaran

Le 23 novembre 2022, Gilles Bueken­hout est en tête des concur­rents de la caté­go­rie Rhum Multi de la Route du Rhum sur son trima­ran Jess, lorsqu’il chavire. Un acci­dent qui va entraî­ner une belle chaîne de soli­da­rité sur l’eau et à terre…

Le skipper amateur Gilles Buekenhout (en haut à droite) s'est retourné avec son trimaran Jess seulement 225 milles avant l'arrivée
Le skipper amateur Gilles Buekenhout (en haut à droite) s'est retourné avec son trimaran Jess seulement 225 milles avant l'arrivée © D.R.

Gilles Bueken­hout – archi­tecte en bâti­ment et skip­per belge de 60 ans, au regard doux et tranquille – a de la chance dans son malheur sur cette Route du Rhum 2022. Avec son bateau, Jess, il accu­mule les embûches : rencontre inop­por­tune avec une bouée cardi­nale vaga­bonde en ralliant Saint-Malo, rupture de son bout-dehors en enfour­nant à peine une heure après le départ de la course. Mais les concours de circons­tances jouent en sa faveur. Son dernier acci­dent aurait pu lui coûter la vie, mais, là encore, la chance fut au rendez-vous.

Ce mercredi 23 novembre, Gilles, large­ment en tête de sa caté­go­rie (Rhum Multi), se trouve à 225 milles au nord-est des côtes guade­lou­péennes. Il est en train de se raser dans le poste de pilo­tage quand il voit un grain arri­ver. Peu inquiet mais prudent, il reprend la barre de son bateau. Il sent alors une très forte vague soule­ver l’ar­rière : Jess enfourne, puis sancit1 en l’es­pace de quelques secondes.

Le trimaran se dresse à la verticale, je fais alors une chute de 12 mètres.
Gilles Buekenhout
Skipper amateur à bord du trimaran "Jess"

Il se retrouve au moins à 1,5 mètre sous l’eau, ce qui lui évite d’être blessé lorsque le multi­coque retombe sur lui, à l’en­vers.

Son réflexe est immé­diat : atteindre la trappe de survie et préve­nir les secours. À 20 h 20 précises, la direc­tion de la course est infor­mée du déclen­che­ment de la balise de détresse et, sept minutes plus tard, le skip­per réus­sit à les joindre à l’aide de son télé­phone Iridium de secours. Il n’est heureu­se­ment pas blessé et parvient à rentrer dans le bateau retourné. Il se réfu­gie dans le carré dévasté et ferme les entrées afin que les vagues ne vident pas tout par effet de siphon­nage.

Les secours immé­dia­te­ment en route

Le CROSS fait immé­dia­te­ment dérou­ter deux cargos, ainsi que Roland Jour­dain et Loïc Escof­fier, concur­rents de la course : le Chem Patriot, qui se dirige vers Rotter­dam, repère Gilles dans la soirée grâce à sa lampe flash. « J’ai craint ne pas pouvoir monter sur le cargo telle­ment j’étais à bout, vidé, se souvient le skip­per. Les 100 mètres de nage pour le rejoindre m’ont épuisé. »

Épuisé mais en sécu­rité, le rescapé est pris en charge par l’équi­page du Chem Patriot. Le comman­dant décide de rame­ner son protégé jusqu’à la Guade­loupe en se dérou­tant à nouveau. Rendez-vous est donné à 7 milles au nord de la pointe de la Grande Vigie pour le lende­main, vers 16 heures, avec la vedette SNS 263 des Sauve­teurs en Mer de Pointe-à-Pitre. Sur place, les béné­voles récu­pèrent Gilles et l’em­mènent jusqu’au Mémo­rial ACTe, lieu d’ar­ri­vée offi­ciel de la course, où l’at­tendent impa­tiem­ment sa femme et sa fille. Lorsque le skip­per débarque, elles l’ac­cueillent avec beau­coup d’émo­tion, accom­pa­gnées par de nombreux fans.

 Article rédigé par Caro­line Guézille, diffusé dans le maga­­­­­­­zine Sauve­­­­­­­tage n°163 (1er trimestre 2023)

Sancir : terme de marine. En parlant d’un navire, chavi­rer en plon­geant d’abord son avant.