L’État fait appel aux compétences de la SNSM pour former des sauveteurs

Vingt agents de la Direc­tion natio­nale garde-côtes des Douanes, appe­lés à parti­ci­per à des opéra­tions de sauve­tage de masse en Manche, ont été formés fin mars 2022 à Boulogne-sur-Mer par des béné­voles de la SNSM.

Sauvetage de migrants dont ce bébé
Les sauveteurs de Dunkerque ont sauvé près de soixante-dix personnes en un week-end en décembre 2021, dont ce bébé © SNSM Dunkerque

C’est une réfé­rence pour la SNSM. En cumu­lant plus de deux mille deux cents inter­ven­tions en 2021 – six fois plus que l’an­née précé­dente –, les stations de Dunkerque, Grave­lines, Calais, Boulogne-sur-Mer et Berck-sur-Mer ont acquis une rare expé­rience du sauve­tage de masse, autre­ment dit des opéra­tions pouvant concer­ner plusieurs dizaines de naufra­gés. Cela avec des moyens nautiques qui étaient prévus à l’ori­gine pour n’em­barquer autant de resca­pés que dans des situa­tions très excep­tion­nelles.

L’ex­plo­sion, depuis 2018, du nombre de traver­sées de la Manche à bord d’em­bar­ca­tions précaires surchar­gées, s’ins­crit dans un mouve­ment plus large de mari­ti­mi­sa­tion des migra­tions. Pour la SNSM, comme pour la Marine natio­nale ou les Douanes, dont les navires sont fréquem­ment amenés à inter­ve­nir, ces sauve­tages impliquant un grand nombre de naufra­gés sont un défi. C’est dans cet esprit que les Douanes et la Marine natio­nale se sont rappro­chées de la SNSM pour lui deman­der, à titre excep­tion­nel, de former les équi­pages de leurs patrouilleurs aux spéci­fi­ci­tés de ce type de sauve­tage. Arnaud Banos, l’un des forma­teurs, sauve­teur embarqué à la station du Havre, a aussi parti­cipé à de nombreuses missions avec des ONG en mer Médi­ter­ra­née et trans­met son exper­tise en matière de sauve­tage de masse.

Gérer le risque

Ainsi, les 25 et 26 mars 2022, à Boulogne-sur-Mer, vingt agents de la Direc­tion natio­nale garde-côtes des Douanes – dont six seront appe­lés à deve­nir à leur tour forma­teurs pour dispen­ser ces appren­tis­sages auprès de leurs collègues –, se sont mobi­li­sés à bord du patrouilleur DF P1 Jacques Oudart Four­men­tin pour une forma­tion complète, depuis la recherche et la sécu­ri­sa­tion d’em­bar­ca­tions en détresse jusqu’à la prise en charge des naufra­gés sur le pont.

Cela en passant par l’ana­lyse de la situa­tion, les tech­niques d’ap­proche de l’em­bar­ca­tion assis­tée pour éviter une panique, et l’étude des risques que peuvent rencon­trer tant les sauve­teurs que les naufra­gés. La récu­pé­ra­tion de nombreuses victimes à l’eau et leur trans­fert vers le patrouilleur ont égale­ment fait partie du programme. Les béné­voles de la SNSM ont partagé leur expé­rience du sauve­tage adapté à ces situa­tions si spéci­fiques de gestion d’un grand nombre de victimes. Des forma­tions simi­laires ont déjà été mises en place pour la Marine Natio­nale à Cher­bourg et certaines stations des Hauts de France et de Seine Mari­time.

Hypo­ther­mie et brûlures

« Les condi­tions des opéra­tions ont beau­coup évolué ces derniers temps, explique Antoine Breton, adjoint au direc­teur de la forma­tion, chargé de la forma­tion sauve­teurs embarqués de la SNSM. Ce ne sont plus de petites embar­ca­tions tentant de traver­ser la Manche par beau temps. Aujour­d’hui, nous pouvons être en présence d’en­gins plus impor­tants navi­guant dans des creux d’1 m avec cinquante à soixante-dix personnes à leur bord.  »

Les maux les plus fréquents dont elles souffrent sont «  l’hy­po­ther­mie et les brûlures provoquées par le carbu­rant répandu dans le fond du bateau, pour­suit Antoine Breton. Il y a aussi des mères avec des enfants, qui requièrent une atten­tion parti­cu­lière. Il faut parfois gérer des confron­ta­tions entre les naufra­gés qui n’en peuvent plus et demandent à être recueillis et ceux qui souhaitent pour­suivre leur traver­sée.  »

De quoi, sans aucun doute, créer des réflexes communs entre les marins des Douanes, de la Marine natio­nale et les béné­voles de la SNSM.

Article rédigé par Domi­nique Malé­cot, diffusé dans le maga­zine Sauve­tage n°160 (2ème trimestre 2022)